Marie,

Auteure
Angela Lugrin
Récit
72 pages, 12 x 15 cm, dos carré collé
« Post-scriptum » de Marie Depussé
Parution : mai 2014

Publié avec le soutien de la région Bretagne

 15,00

UGS : 978-2-917751-40-4 Catégorie :

Description

Angela Lugrin écrit « la lettre impos­sible » à Marie Depussé. Marie Depussé a travaillé à la clinique psychia­trique de La Borde et à Paris comme psycha­na­lyste. Elle a ensei­gné paral­lè­le­ment la litté­ra­ture à l’université Paris VII, aussi bien en milieu carcé­ral que dans le cadre du Daeu. Elle a publié notam­ment, chez P.O.L., six livres, de Dieu gît dans les détails (1993) à La nuit tombe quand elle veut (2011).
Marie Depussé a laissé des traces vives chez ses étudiants, et pas seule­ment chez Angela Lugrin qui l’a davan­tage suivie, un temps, en ensei­gnant à ses côtés. Leur rencontre ? Angela Lugrin suit son parcours d’étudiante en lettres, mais éprouve « l’université comme la chambre mortuaire de la pensée » et vit paral­lè­le­ment « éner­gie, amitié brutes » dans le punk-​rock. Et puis il y a la voix, litté­ra­le­ment, de Marie Depussé. Pas seule­ment, mais d’abord cette chose-​là, une voix, qui dit la litté­ra­ture, la « parle », oscil­lant entre culture d’une extrême exigence et « chemins ailés », chemins buis­son­niers dans la pensée des textes — de la litté­ra­ture, des mots. De cette rencontre inau­gu­rale avec la voix naît celle avec une femme « si violem­ment belle et femme », excen­trique, ou plutôt déca­lée, et qui depuis prend chez Angela Lugrin une place si intense, si incan­des­cente, qu’elle doit être dite, avec ses mots à elle, Angela, et pour elle, Marie — lui « écrire est une injonction ».
Tour à tour, par petites touches, par blocs de mots et d’émotions, Angela Lugrin trace un portrait de celle qu’elle appelle, invoque, « Marie » : Marie, la litté­ra­ture (ce qui rapproche les deux femmes, de prime abord, ce qui s’entend dans ce récit : la propre sensi­bi­lité de la lecture qu’enseigne Angela Lugrin) ; Marie, la folie (La Borde) ; Marie, la confi­dente ; Marie, la beauté ; Marie, la sœur, la frater­nelle ; et surtout Marie, la mère — « je ne peux pas vous évoquer sans que l’image de la mère s’interpose », soule­vant les « ques­tions autour de la mère qui est la mienne et de celle que je suis, de la mère sans enfant que vous êtes ».
S’inscrit ainsi en creux un autre portrait, celui de celle qui écrit, qui évoque, outre ses rapports à la litté­ra­ture, à sa mère, son père psycha­na­lyste, prati­cien en hôpi­tal psychia­trique (« une petite ville »), le temps de l’enfance pour elle, « cette enfance qui m’a donné des mots qui ne sont pas tout à fait les miens » et que Marie appelle donc à se réapproprier.
Marie Depussé dans son « post-​scriptum » entend, « non y répondre, mais prolon­ger [ce livre] », non le « commen­ter » mais aller « vers ce qui “me tire en avant, m’interpelle” » : « Où l’effet de l’injonction s’arrête-t-il ? Il se prolonge en moi. » Et le dit magni­fi­que­ment : « cette injonc­tion […] est une déli­vrance, une magni­fique déli­vrance, pour nous deux, et, je l’espère, pour d’autres […]. Elle nous auto­rise à “en venir à nous-​mêmes comme à ce qui n’est pas encore”. »

Notes de lecture

« Confiance, confi­dence, croyance, écoute, projec­tion : il est ques­tion d’une parole qui circule dans le temps et recons­ti­tue une tempo­ra­lité en déséqui­libre, un dit qui prend en charge et décharge la violence, les violences. Renon­cer à la provo­ca­tion tout en accé­dant à l’intensité d’une vie que n’oublie jamais la contes­ta­tion. […] ce “Marie” cache et révèle Angela, de même que la voix écrite d’Angela réveille les voix de Marie, voix doubles qui parcourent l’oral et l’écrit, renver­sant la hiérar­chie plato­ni­cienne selon laquelle le second n’imiterait que bien pauvre­ment et dange­reu­se­ment le premier. […] Livre destiné, desti­na­tion du livre. On écrit toujours pour quelqu’un, et le miracle, ici, fait que chaque lecteur s’appelle, d’une certaine façon, Marie, que chaque desti­na­taire se révèle Angela. La lettre donne nais­sance au livre, la voix conduit au texte, l’hommage mène au récit : nos mères ne sont pas toujours celles qu’on croit, nos filles sont parfois insues. Elles se ressou­viennent d’un savoir et d’une beauté oubliés, à rebours du mouve­ment selon lequel la trans­mis­sion appor­te­rait du neuf et de l’inédit. »
Anne Mala­prade, Poezi­bao, 25 juillet 2014

« La réflexion est en perma­nence au centre de cette lettre qui se trans­forme en premier livre. Elle invite au dialogue, y compris avec soi-​même. Angela Lugrin dit, au fil des pages, qui elle est, sans jamais s’appesantir. Il y a ses joies, ses échecs, son travail, sa musique punk, ses filles mais surtout cette quête d’un bien-​être qui passe par la rela­tion aux autres et dans laquelle la présence rassu­rante de Marie Depussé est essentielle. »
Jacques Josse, Remue​.net, 29 juillet 2014