M

Autrice
Isabelle Baladine Howald
Poésie
62 pages, 12 x 15 cm
Parution : février 2024

Publié avec le soutien du Centre national du livre et de la région Bretagne

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 13,00

UGS : 978-2-490385-40-9 Catégorie :

Description

M est un person­nage, prin­ci­pa­le­ment inspiré par la figure des belles-​mères dans les contes de Grimm. M est la mère, tout à la fois Mère et maman, elle est ogresse et obscène, et face à elle la langue, ou plutôt le sujet, ne peut que bégayer. Le je est coupé : c’est souvent un j’, un sujet incom­plet (comme d’ailleurs dans tous les livres d’Isabelle Bala­dine Howald), une tenta­tive du sujet d’exister face à m. Non sans mal, ou para­doxa­le­ment en tenant de cette impuis­sance : « Éprou­ver que je ne peux plus […] / je suis de ne plus pouvoir et qu’il faille encore / ne plus pouvoir ». Dans M / m s’entend aussi aime — ou son impos­si­bi­lité, juste­ment —, ou un empê­che­ment du pronom person­nel me (me, el’ me) — notam­ment quand le m est redou­blé (« penser que je ne suis plus / capable d’aimer m m mise au monde […] / m coupe le souffle m m porte un coup ») —, ou encore : « m de tête », « tête ne me fera plus m mal ». Ce bégaie­ment du m, les très nombreuses césures, ou l’éloignement des sujets m ou j’ de leur verbe, contri­buent à une langue trouée, discon­ti­nue. Au même titre que l’entrecroisement des temps, et celui du « réel » et de l’imaginaire des contes.
Car le corps de M, le livre, tient à la fois de cet imagi­naire et d’un « je me souviens », néces­sai­re­ment frag­men­taire, refoulé, fantasmé, vécu, rele­vant aussi d’un « roman fami­lial » (dont je n’a « jamais rien cru »). Dans l’un comme dans l’autre, « toutes les versions sont sujettes à doute ». « Le monde me semble l’envers ». Le corps de m, le person­nage, y est sans cesse exposé au corps de j’ qui a beau­coup de mal à tenir debout en face. Les réfé­rences aux contes (pas seule­ment de Grimm, mais de Perrault, à Peter Pan ou même à Ophé­lie) émaillent le constat du « corps informe énorme » de m, proche de la mort : « peur quand elle mourra j’ ai peur de suffo­quer de rire à gorge égor­gée », « langue crache / venin et pier­re­ries noires », « sinon la piqûre m’endormait pour cent ans ».
C’est une langue possible pour le corps, une possi­bi­lité d’enfance, qu’Isabelle Bala­dine Howald tente de retrou­ver, et celle-​ci survient à la toute fin, par le biais d’une petite fille « neuve », comme celles des contes que leur inno­cence sauve.