Déplier les silences

Autrice
Brigitte Mouchel
Poésie
84 pages, 12 x 15 cm
Parution : novembre 2022

Publié avec le soutien du Centre national du livre et de la région Bretagne

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 14,00

ISBN  978-2-490385-35-5 Catégorie 

Description

C’est une « narra­tion » au long cours que propose cette fois Brigitte Mouchel, comme déployant ce qui se tissait jusque-​là au sein de ses recueils précé­dents, le fil de proses-​poèmes à la fois indé­pen­dantes et reliées.
Ce qui se déroule ici est une histoire de famille, mais sans généa­lo­gie ni chro­no­lo­gie. Les repères sont brouillés, à l’image de ces cartons (déc)ouverts, pleins de « vies enche­vê­trées, de silences et de plis » qui restent entre les mains. Des photo­gra­phies, des lettres, divers docu­ments jaunis, craque­lés, seules traces de vies de femmes, d’hommes et d’enfants dont on ne démêle pas bien les géné­ra­tions, les liens fami­liaux même.
Deux branches se discernent, l’une bour­geoise, l’autre ouvrière et paysanne : les ingé­nieurs ou autres « triom­phants », « hommes en costume, à mous­taches et médailles », « épin­glés, droits », ceux-​là sont « de l’autre bord » ; et les « petites gens, petits métiers », « sans nom, sans traces ». Les hommes y sont fragiles (le mot est répété souvent), les mères, mélan­co­liques ou qui s’abandonnent « dans les plis », les femmes, « massives », dures, engon­cées (celles des maisons aux seuils de pierre et draps aux initiales brodées, celles-​là, « sœurs, ronces, cousines », ont « mangé les petits hommes blonds et fragiles ») ou exilées (« une jeune femme seule venue de province avec un enfant sous le bras — un panier », « l’enfant devient boulan­ger »). Les enfants meurent, sont orphe­lins, ou délais­sés, « grimpent aux branches fragiles ». Les femmes autour des enfants, pères absents (la guerre, aussi), « la famille pour­suit son travail de nais­sances, sans bruit, les bles­sures enfouies ». Les visages à se ressem­bler se super­posent, les prénoms sont repris, on ne sait plus.
Des images récur­rentes, le jardin au pommier, la neige, le vent, les jambes nues, le piano et les chats, les cailloux blancs de petits poucets…, et le silence, de l’inquiétude et du chagrin — quelques phrases qui font refrain. Il y a, comme toujours chez Brigitte Mouchel, beau­coup d’allusions, un effleu­re­ment des choses, beau­coup de tendresse. La voix basse, feutrée, retrouve souffle dans les tirets qui tracent les paren­thèses néces­saires, où s’essayent les mots plus justes. « Elle reprend — recom­mence », pour dire « la mémoire plus dense par instants que la neige et bien étranges les pommes », la « mémoire réfu­giée » de l’enfance nue.