Description
Un jour m’arrive ce poème de Maud Sulter, artiste écossaise et ghanéenne dont je découvre l’existence à l’occasion de sa première exposition en France en 2016. Traduisant Blood Money (remix) pour la série Syrcas, je sais qu’il me raconte quelque chose de cet aïeul disparu, son absence de toujours – l’histoire perdue de mon arrière-grand-père Moëvi, cuisinier chez des patrons allemands dans le Togo colonial, qui embarqua avec eux pour l’Allemagne entre les deux guerres, et que ma grand- mère, sa fille, Adolé Elisabeth Akueson Moëvi, alors âgée de quinze ans, n’a plus jamais revu.
Sika Fakambi
Notes de lecture
« Ouvrir le coffret
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Regarder les alignements de lettres et de mots
Ne pas lire pour l’instant
Écouter le cd
la piste 1 en allemand,
la piste 2 en français,
la piste 3 en anglais,
même si,
comme moi,
vous ne comprenez que quelques mots
en anglais, en allemand
prendre un moment en silence
écouter la piste 4 lectures croisées
Close your eyes and imagine a German.
Schließ deine Augen und stell dir einen Deutschen vor.
Ferme les yeux et imagine un Allemand.
J’ai fermé les yeux, je n’ai pu imaginer quiconque
juste ces chiffres tatoués sur ton bras
chacun‑e son histoire, sa mémoire
Lire alors “le prix du sang (remix)”
lentement
comme en contrepoint de la mémoire de l’écoute
“une étoile rouge de communiste et un triangle noir
renversé – signe distinctif de certaine catégorie
de race biologique…”
le poids des mots
Kwesi
le camp de concentration
“la mort avec les tsiganes et les juifs et les homos et les autres”.
comme dire que je partage ce
“elle me hante”. »
Didier Epsztajn, Entre les lignes entre les mots, 31 mars 2017