Rouilles

Auteure
Françoise Louise Demorgny
Récit
92 pages, 12 x 15 cm
Parution : juin 2015

Publié avec le soutien de la région Bretagne

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 15,00

Épuisé

ISBN  978-2-917751-56-5 Catégorie 

Description

« Elle vient d’un pays de fer, de fonte. De pluie. De rouille. »
Avec la rouille pour « fil rouge », brodant « à points menus des temps et des visages, des gens et des villages », Fran­çoise Louise Demor­gny fait ici revivre des hommes et des femmes aux « vies minus­cules » dans les Ardennes de son enfance. Tout en traver­sant d’une page à l’autre sa vie d’adulte, ici ou là, la narra­trice, « la louise de tous les chevaux », revient sur Cécile et Louis, les parents, Fernand, « un qui-va-à‑l’usine », Alci­die la coutu­rière, Rose, fauchée par un train en 1937, ou encore la poupée Sylvie, opérée d’une crise d’appendicite et qui en garde le stig­mate. L’on y croise « l’Arthur », roi-​poète des Ardennes. Il y est aussi ques­tion d’une attache de volet d’abord iden­ti­fiée à Marianne, bergère à la figure empâ­tée sous les couches de pein­ture se révé­lant berger, et consa­crée relique. Ou d’un cœur en tôle, « ancien, rouillé, aban­donné » dans la poubelle du cime­tière, et qui seul retrace l’existence de Jules, qui s’est pendu à 41 ans.
Cette gale­rie de person­nages, campée avec beau­coup de tendresse et d’humour, est enrô­lée dans un « théâtre d’ombres en partance », un temps rappe­lées à la mémoire, où chacun, « maigre témoin d’un passage », comme la rouille, va « fière­ment à la catas­trophe, la dislo­ca­tion ultime, poussé par son histoire ».

Notes de lecture

À lire :
• Un coup de cœur libraire, Patrick Frêche, de la librai­rie du Rivage à Royan.

À écou­ter :
• Sur Radio Gâtine, Lily l’a lu, une présen­ta­tion et une lecture d’ex­traits de Rouilles, par Marie-​Claude Rossard, le 20 octobre 2015.
• Une lecture par Valé­rie Schlée, lors de la rencontre avec Fran­çoise Louise Demor­gny à la librai­rie Mots & Cie de Carcas­sonne, le 14 novembre 2015 .

« … Il se trouve que les rouilles, si on prend la peine de remon­ter le temps en leur compa­gnie, s’avèrent bien moins silen­cieuses qu’il n’y paraît. Elles ont des histoires à racon­ter. Il suffit de les ques­tion­ner. C’est à cela que s’attache préci­sé­ment la louise. Au fil de ses repé­rages, elle avise çà et là des objets érodés, couverts d’une pelli­cule écaillée qui hésite entre le jaune, le roux, l’orange et le rouge. […]
“Toutes abritent des histoires dont le fil s’est perdu. Elles ne s’incarnent plus dans les visages. Ne sont plus amar­rées à des prénoms.”
Ces histoires remontent à la surface au fur et à mesure que la narra­trice revient sur son propre parcours, tissant une gale­rie de portraits atta­chants qui s’assemblent pour donner vie à un récit habité par cette Ardenne fron­ta­lière à laquelle il s’adosse. L’écriture de Fran­çoise Louise Demor­gny, dont c’est le premier livre, s’inscrit parfai­te­ment dans ce terri­toire austère mais fasci­nant. Pas d’emphase. Bien au contraire. Son regard sur ces vies rudes et assu­mées malgré les coups du sort est plein d’humanité. Les réfé­rences aux auteurs cités se font discrètes tout en s’insérant subti­le­ment dans le texte tandis que langue, syntaxe et lexique sont tout simple­ment épatants. »
Jacques Josse, Remue​.net, 13 juillet 2015

« Un petit livre que l’on lit d’une traite dans une sorte d’envoûtement pour cet univers étrange, qui n’est pas sans faire songer au Pierre Bergou­nioux des Forges de Syam, au Jean-​Pascal Dubost de Fondrie, à Valé­rie Rouzeau quand elle évoque le métier de ferrailleurs de son père et aussi fugi­ti­ve­ment à Mary-​Laure Zoss. »
Florence Trocmé, Poezi­bao, Le flotoir, 24 juillet 2015

« C’est un beau petit livre rouge, une certaine nuance de rouille. Ne cher­chez pas, Fran­çoise Louise Demor­gny publie là son premier livre. Une arri­vée discrète chez un éditeur qui l’est tout autant, mais quel texte et quelle émotion dans les mots égrai­nés en courts para­graphes qui disent beau­coup de la sensi­bi­lité de l’auteure. La rouille, témoin de l’usure du temps, de la vie, des êtres aimés. Et si pous­sière nous sommes, c’est à la limaille qu’aspire Fran­çoise Louise Demor­gny pour sa dernière heure, fidèle à ses origines arden­naises. “Elle vient d’un pays de fer, de fonte, de pluie, de rouille”, cette Louise qui chemine entre Ardennes et Ardèche portée par les trois chevaux d’Erri De Luca, un pour chaque âge de sa vie. L’ombre d’Arthur de Char­le­ville se glisse dans les souve­nirs qui escortent les chevau­chées ultimes de Louise, empor­tée par “la rouille têtue et patiente”, comme le temps, vers le grand vide et le grand oubli.
Magni­fique et bouleversant. »
Marie-​Claude Rossard, coup de cœur sur le site Libraires indé­pen­dants Poitou-​Charentes, octobre 2015

« Rouilles de Fran­çoise Louise Demor­gny est un de ces petits chefs‑d’œuvre. En une prose poétique somp­tueuse qui coule comme fluide et clair ruis­seau, l’auteur donne splen­dide vie écrite aux exis­tences anonymes de celles et ceux qui traver­sèrent et traversent encore ses jours. Avant-​hier, dans l’Ardenne : “Elle vient d’un pays de fer, de fonte, de rouille. Il y pleut sur les fonde­ries fondues, vendues aux ronciers, sur les forges étran­glées rendues au silence, sur le feu étouffé, les forces refroi­dies. Sur les noms bâillon­nés.” Hier, en Ardèche : “Belles années par dizaines. Années de papier, de livres et cahiers, odeurs de colle fraîche. Années de bois, de planches, copeaux, sciure aux essences si souvent respi­rées qu’elle les diffé­ren­ciait à l’aveugle dans les cheveux du menui­sier.” Aujourd’hui, sur le litto­ral de Bretagne : “Non, elle ne racon­tera pas comment Coren­tin Le Bihan, sur un chan­tier de Douar­ne­nez, a planté ce clou dans les flancs du chalu­tier La Jubi­lante. Ne dira pas que Coren­tin sifflo­tait dans ses dents, impa­tient d’en finir parce que Mary­vonne avait accou­ché dans la nuit de leur fils premier-​né…” Et ainsi, tous ces person­nages et ces paysages appe­lés ou rappe­lés à la mémoire de la narra­trice, décou­verts par notre lecture atten­tive et fiévreuse, vont, comme la rouille qui donne son titre à ce petit précis de mélan­co­lie tendre, “fière­ment à la catas­trophe, la dislo­ca­tion ultime, poussé par leur histoire”. »
Alain-​Gabriel Monot, « Les éditions isabelle sauvage, en majesté », Hopala !, n° 49, novembre 2015

« Sous une élégante couver­ture rouge qui tire à la rouille – quelle est au fond la vraie couleur de la rouille ? –, ce récit de Fran­çoise Louise Demor­gny évoque à travers trois figures centrales de femmes – grand-​mère, mère et la fille, narra­trice égale­ment – l’évolution de temps modi­fiés ou dispa­rus et les person­nages qui y étaient emmê­lés. Il ne s’agit pas de nostal­gie, mais de rendre hommage à ces personnes et aux univers arden­nais dans lesquels ils demeurent inscrits, vie aux champs ou fonde­ries. Souve­nirs et cime­tières s’articulent autour de la rouille, d’objets dont elle fait qu’ils deviennent porteurs de mémoire, qu’il s’agisse symbo­li­que­ment d’une tête de bergère pour les volets, ou des clous que fabri­quait la mère. “Rien n’a plus d’avenir que la rouille” écrit l’auteur à mi-​chemin de ce texte ponc­tué de vers et dont le lyrisme retenu est porteur d’une sensi­bi­lité forte. Trace des passés, la rouille devient une chose vivante qui relie les géné­ra­tions et se retrouve dans la narra­trice, “louise gigogne qui contient toutes ses louises depuis l’enfance”. Dans ce récit qui abolit les fron­tières, on croise aussi Arthur Rimbaud, figure d’une promesse, celle d’une liberté aussi chaleu­reuse que les nuances évoquées par le pluriel du titre. »
Ludo­vic Degroote, CCP – Cahier critique de poésie # 31 – 2, 2 décembre 2015

« Dans Rouilles, la narra­trice, “la louise”, retourne sans son Ardenne natale (“un pays rugueux / qui ne pétille pas / n’a pas de bulles à vendre”) alors qu’elle “attaque son troi­sième cheval” (Erri de Luca : “Une vie d’homme équi­vaut en gros à celles de trois chevaux.”). Elle y retrouve la trace de “l’Arthur” mis en nour­rice dans une famille de clou­tiers. Sait-​on, demande l’auteure, “que ses premières images sont rougies du brasier de la forge, crevées du bing bang de la masse sur l’enclume, qui sont deux énor­mi­tés ? D’où vient-​elle, la‘poudre de rubis brûlante’ de sa ‘chan­son de la plus haute tour’ ? D’où viennent-​ils les‘crachats rouges de la mitraill’ du poème ‘Le mal’ ?” Mais elle n’est pas reve­nue au pays pour alimen­ter les études rimbal­diennes, la louise. Elle est reve­nue cher­cher “dans les rouilles outre­pas­sées quelque chose d’apaisant, comme une défaite heureuse, un aban­don ultime”. Rouilles est le premier livre d’une écri­vaine née en 1946. Conti­nuez à écrire, Fran­çoise Louise Demorgny. »
José Bernard Corteg­giani, Bibliobs, 11 août 2017

« À travers les vestiges et les empreintes, la narra­trice, “la louise”, rappelle à elle les diffé­rents âges de sa vie, les exis­tences croi­sées et dispa­rues sous la rouille “têtue et patiente”.
Le souve­nir émerge, oxydé et sensible.
Un hommage au terri­toire de son enfance donc, où se promène çà et là Arthur Rimbaud, parmi d’autres.
Une évoca­tion capti­vante d’un passé presque éteint sous sa teinte rous­sie, mais qui bat fort dans le cœur de la louise. »
Julie Lebouc, « Il faut lire Fran­çoise Louise Demor­gny ! », Écrire sa vie, 2020