Description
Julien est un grand rêveur. Non pas de rêves éveillés, mais de « vrais » rêves, ceux qui naissent pendant son sommeil. C’est de leur inaliénable puissance qu’il s’agit dans ce récit. Une puissance qu’ignorent les procédures de maîtrise, de pouvoir, mises en place par une société de la « communication », de « l’évaluation », de la « performance », toutes appellations qui recouvrent l’idéologie par laquelle on resserre l’étau autour de ceux qu’il faut rendre « profitables ».
La puissance des rêves ne peut être asservie : c’est ce dont Julien fera l’expérience — malgré ses tentatives « d’adaptabilité », un moment saluées par son agence polemploi.
Julien le rêveur n’est pas un traité sociopolitique mais une fantaisie, dont le cœur bat dans un « cahier de rêves », nourri, entre autres, de poètes aimés. Une fantaisie qui s’amuse aussi de son autrice, peu encline, avoue-t-elle, à « écrire pour raconter des histoires ».
Julien le rêveur est un conte politique et poétique.
Notes de lecture
« Dans le monde des employés polemploi (et de leurs cravates multicolores), de l’adaptabilité, de la flexibilisation, de “la ludification des rapports entre collaborateurs et responsables”, du ministère de la Volonté du travail, des décrocheurs, du déficit d’adaptabilité, du “boostage” de parcours professionnel, des stages “de formation pour aidants à la formation animée par un formateur de formatants”, un homme, Julien, dont la seule “compétence” semble être la capacité de rêver. […]
Christiane Veschambre, avec une ironie pleine de tendresse, présente Julien et ses rêves pour autrui, son écoute sur le vide du sommeil ou la clôture de l’insomnie, les bouleversements de chacun·e face au rêve devenu leur rêve. […]
Et lorsque l’espace des rêves se développe, la réalité formatée peut perdre du terrain, et les employés perdre leur cravate ! […]
Un petit livre, traversé par un insecte aboyeur, ouvert sur l’infini des possibles, “Du bord de ce trou noir, il semblait que l’horizon des événements s’était immensément élargi”. Contre la sclérose de l’ordre managérial… »
Didier Epsztajn, « Il y eut des jours et des nuits blancs », Entre les lignes entre les mots, 29 juillet 2022« Julien ne sait “rien” faire, c’est ce qu’il répond au conseiller “polemploi” cravaté en face de lui – mais Julien sait rêver tandis que tant d’autres ne savent plus, ne savent pas. Alors pourquoi ne pas rêver pour autrui ? lui suggère sa voisine écrivaine publique.
Julien le rêveur est l’histoire de Julien qui envisage de faire profession de son principal talent.
Julien le rêveur est aussi l’histoire de la narratrice de Julien le rêveur qui raconte comment Julien envisage de faire profession de rêveur public, ou plutôt de conseiller onirique, car quand il s’agit de faire profession, les mots comptent. La narratrice de Julien le rêveur écrit mais ne fait pas non plus profession de romancier, quiconque a déjà lu Christiane Veschambre (Les Mots pauvres, La Maison de terre, Versailles Chantiers…) sait déjà qu’elle non plus. Ses personnages sont moins des personnages que des personnes. Le “cahier de rêves” qui vient naturellement s’insérer est vrai comme le sont les rêves. Et ce n’est pas la narratrice qui décidera ce qu’il adviendra de Julien et de ses rêves. »
Philippe Annocque, « Avis aux rêveuses et aux rêveurs », Hublots, 15 octobre 2022