À bout

Auteure
Nathalie de Courson
Récit
132 pages, 14 x 20 cm
Parution : novembre 2019

Publié avec le soutien de la région Bretagne

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 18,00

UGS : 978-2-490385-06-5 Catégorie :

Description

C’est après avoir trouvé dans la poubelle du vieil About, son père, une « enve­loppe agra­fée, déchi­rée, et vide », ne compor­tant que ces quelques mots : « trouvé après perte de la perte de tout d », que la narra­trice entre­prend son récit et s’« accroche à ce d qui défait ».
Et ce qui se défait, « là-​bas, à Péri­court », c’est la figure du père, son corps, sa mémoire et sa dignité… devant ses cinq enfants, inquiets et désemparés.
Avec un humour caus­tique, l’auteure nous présente cette fratrie soudée, dans laquelle chacun/​chacune joue un rôle diffé­rent : Primus, Trio­lette (la narra­trice), Quar­tette, Quin­tette et Benja­min… et même Seconde, la première fille du vieil About, la chère dispa­rue. À coup de « plan­nings colo­rés », tous se relaient auprès du père pour assu­rer les tours de garde et se débrouillent comme ils peuvent pour ne pas le haïr.
« Les réti­cences envers le vieil About — de la pitié à l’exaspération — sont variables selon l’histoire de chacun », mais tous ont du mal à assu­mer cette « lignée d’hommes depuis des siècles pris dans l’Histoire », « une vieille famille fran­çaise, une dynas­tie de mili­taires et de diplo­mates », où « même les adul­tères ont un air légitime ».
Dans une alter­nance de passages narra­tifs et de dialogues par mails inter­po­sés, ce récit de filia­tion porte sur l’étrangeté des origines, la diffi­culté d’hériter et de se frayer un chemin de vérité avec toutes ces voix qui parlent autour et à l’intérieur de soi.

Notes de lecture

« C’est essen­tiel­le­ment par la voix de Trio­lette, l’enseignante, que Natha­lie de Cour­son mène l’interaction des échanges entre frères et sœurs aguer­ris aux mails collec­tifs. Trio­lette, l’enfant du milieu, qui se déplace le plus souvent à Péri­court pour suppor­ter le père décli­nant et qui redoute la place qu’elle occupe : “J’y lis aussi la crainte d’écraser mes frères et sœurs – moi, simple Trio­lette – avec ma voix narra­tive prédo­mi­nante. Peur – ou désir – d’imposer ma parole et de garder le volant, quitte à tout avilir, à sentir mauvais, et, comme le vieil About, à ne pas être en état de conduire, de me conduire, de conduire mon récit.” Avec agilité elle y parvient faisant réson­ner celle des quatre autres, tour à tour expri­mée ou ressen­tie. “Chacun de nous a sa maison et son visage à soi, son moi indi­vi­duel à côté du moi tribal. Nous nous montrons compacts et vigou­reux aux yeux des quatre autres, accen­tuant chacun ce qui nous est particulier.” […]
Un récit auda­cieux cousu entre les passages narra­tifs et les échanges par messages inter­po­sés, dans lequel la filia­tion devient un person­nage à part entière, sans cesse à rebattre les cartes entre la pitié et l’exaspération lorsque “Certaines choses de toujours se sont trans­for­mées en choses d’aujourd’hui”. »
Benoit Colboc, « Tyran­nie domes­tique », Lundiou­mardi, 26 novembre 2019

« Natha­lie de Cour­son publie un inté­res­sant poème-​récit aux éditions Isabelle Sauvage. Le thème : ce que vivent, ressentent, comprennent les diffé­rents membres d’une fratrie de cinq enfants devant la déchéance progres­sive de leur père, le vieil About, person­nage haut en couleurs qui suscite chez ses enfants un mélange d’admiration, de haine et malgré tout d’amour. Le livre est très bien construit, enchaî­nant les points de vue des trois sœurs et des deux frères, soit en première personne, mais avec cepen­dant une narra­trice qui mène la danse, soit via des extraits de lettres qu’ils s’écrivent les uns aux autres. L’écriture de Natha­lie de Cour­son se plie en souplesse à ces contraintes, reste très fluide et natu­relle. On est emporté par ce livre qui suscite bien des échos avec des situa­tions dont on peut avoir connais­sance, direc­te­ment ou indi­rec­te­ment. C’est ainsi que les scènes prises sur le vif dans la rési­dence de retraite sont presqu’hallucinantes de vérité et suscitent un vrai effroi de nature onto­lo­gique. C’est un premier livre de fiction de l’auteur qui a égale­ment publié un essai sur Natha­lie Sarraute, ce qui est une sorte d’indice. On peut aussi penser ici à certains textes de Claire Dumay. »
Florence Trocmé, Poezi­bao, 16 décembre 2019

« Natha­lie de Cour­son nous propose un récit puis­sant, animé par les voix plurielles des “cinq enfants du vieil About”, Primus, Trio­lette, Quar­tette, Quin­tette et Benja­min, des lieux peuplés “de vieillards et de vieillardes”, leurs mémoires et leurs pressentiments…
Une lecture partielle et partiale qui n’escompte pas venir à bout des histoires de cette “fratrie” et des rela­tions au père. Une lecture qui ne dira rien des plan­nings de tour de garde…
Péri­court, le vieil About, des échanges entre frères et sœurs, le temps d’avant l’ouragan, le temps où “même les adul­tères ont un air légi­time”, le temps de petites imper­ti­nences simples… L’ouragan 68 et le temps des mises à la poubelle.
Une voix narra­tive prédo­mi­nante, “Mais à vrai dire ce récit va descendre tout seul la pente épou­sant les cahots de la route du vieil About sans que j’ai le choix de bifur­quer”. Les cahots sont nombreux, les bifur­ca­tions person­na­li­sées, les senti­ments se mani­festent entre pitié et exacerbation. […]
Un voyage caus­tique au pays toujours en recom­po­si­tion de la famille, des héri­tages, des ruptures et des conti­nui­tés, “Les moments d’accalmie sont les plus inquié­tants, centre vide et compact de l’ouragan”… »
Didier Epsz­tajn, « La mort réelle aurait pu se fondre dans les morts fictives », Entre les lignes entre les mots, 17 janvier 2020

« Voici un roman qui tient beau­coup de la prose poétique avec du mordant, du répon­dant. Qui fait rire. Qui bouleverse.
Il résonne en nous comme un écho à deux facettes. Fami­lier et loin­tain. Doulou­reux et salu­taire. Qui passe, passe encore et repasse. Revient sans cesse.
Une histoire de famille.
Avec les souter­rains qui vont avec. Les choses tues de longue date ou lâchées trop vive­ment ; les plaies vives qui en résultent. […]
L’auteur jongle, habile, et livre des pages grouillantes d’un récit des profon­deurs. Pages impré­gnées de déli­ca­tesse, de celle où suinte l’amour.
Avec la perte omniprésente. […]
Parfum d’enfance, souve­nirs profon­dé­ment enfouis, terres du passé labou­rées, travaillées, retour­nées sans cesse… »
Cathe­rine Blanche, La Cause litté­raire, 25 mai 2020

« Dans À bout, de Cour­son scrute les pesan­teurs de la filia­tion (cinq enfants autour d’un père qui se défait). »
JB Corteg­giani, L’Obs, 9 septembre 2021