Description
« Eux, c’est tout à l’ouest qu’ils vivent, eux avec Else À l’autre bout, au bout du monde, e penn ar bed ça se dit dans l’autre langue L’une et l’autre langue tout à l’ouest. »
Ainsi commence Les jours où Else. On peut d’abord y voir le simple récit d’une existence ordinaire dans une campagne du bout du monde. Aussitôt pourtant il faut se détacher de cette première impression : ce n’est pas un mais plusieurs récits, tant la narration y est peu rectiligne et discontinue, les temps de l’histoire entremêlés les uns aux autres. Ce sont des bribes d’une vie où l’aujourd’hui côtoie l’hier et déjà l’à venir, dans le souvenir de parents ou d’aïeux, de vivants et de morts. Des contes bretons ou islandais s’y inscrivent comme tout naturellement en écho ; ancestraux, faisant contrepoint, ils ne sont pas si décalés finalement. Deux langues se côtoient, se chevauchent : le breton maternel, familier (celui dans lequel a grandi Lou Raoul), loin de tout folklore régionaliste, et le français finalement appris, bousculé dans la familiarité du breton. Le monde à vivre y est analysé au prisme de ces deux langues : deux mondes se nourrissent et se rassemblent.
Avec cette langue comme hachée, sans ponctuation, un rythme très singulier comme ânonné, Lou Raoul s’inscrit de façon moderne, libre, dans l’histoire et la mythologie culturelle et familiale toutes de rudesse et de tendresse à la fois qui ont façonné ce bout du monde et dont elle gomme les frontières temporelles pour mieux les cerner.
Notes de lecture
« Ce livre est un vrai bijou. J’ai été transportée par ces récits imbriqués… »
Valérie Canat de Chézy, Verre menthe, 27 janvier 2011
« C’est la vie dure, la vie difficile et c’est magnifiquement rendu par le tressage des contes, du récit d’une vie banale aux rares joies, et de la chanson triste, comme s’il s’agissait d’appliquer le baume des mots, sans craindre de répéter (Ur wech e oa c’hoazh, Il était encore une fois) comme pour apprivoiser douleur et brièveté du passage et finalement comprendre que “tout est donné avant le temps, dans le temps, préservé pour tout le temps à venir”. »
Ronald Klapka, La Lettre de la Magdelaine, juin 2011
« Cet écrit n’est pas à classer ici ou là, dans telle case ou dans telle autre, ce livre est. Il est. Il est avec l’écriture singulière de Lou Raoul […]. On pense aux veillées où les vieux racontaient les histoires, transmettre, ne pas que ça s’oublie. On pense aux veillées des morts. On ne les oublie pas. Et on n’a pas envie d’oublier Lou Raoul… »
Cécile Guivarch, Terre à ciel, juillet 2011